L’Europe, par son enlisement dans un réseau de traités, d’institutions, d’organisations, d’alliances militaires se soumet volontairement aux États-Unis sur tous les plans. De par leur appartenance à l’Union Européenne et à l’OTAN, la majorité des pays européens ne sont plus voués qu’à être les valets des Américains. C’est dans ce contexte que le vieux continent a tendance à refuser la coopération avec la Russie, jugée dangereuse par Washington.
En excluant la Russie de l’Europe, les États-Unis entendent appuyer leur influence pour combler le vide que laisse la grande nation européenne mise en autarcie par ses continentaux.
Il apparaît comme évident que les bénéfices que pourraient apporter une coopération intelligente entre la Russie, riche en énergie et l’Occident industrialisé, serviraient les deux parties. Un symbole de ce pragmatisme est le projet de gazoduc Nordstream 2, reliant la Russie à l’Allemagne, qui permettrait aux européens de s’approvisionner en gaz à un prix raisonnable. Certaines « élites » européennes américanisées sont pourtant bien déterminées à bloquer l’achèvement de ce projet.
Bien que l’application ici de la doctrine libérale pourrait éviter ce fiasco, en prenant en compte le fait que les pays européens tireraient un avantage économique d’un tel projet, il semble que celle-ci ne s’applique pas dans ce cas précis. La servilité de nos élites européennes est plus forte encore que le dogme suprême qu’est l’ultra-libéralisme.
Pour les dirigeants Européens pro-USA, toutes les raisons sont bonnes pour avorter le projet : le vote de la Crimée pour rejoindre la Russie, faussement dépeint comme une conquête militaire ; l’incroyable saga du non-empoisonnement d’Alexei Navalny ; et le dernier en date : une obscure explosion de 2014 en République tchèque qui est soudainement attribuée à la même paire d’espions russes qui n’auraient pas réussi à empoisonner les Skripals à Salisbury en 2018. Le manque de preuve et la calomnie ne sont visiblement pas des freins à l’action chez nos élites.
En Allemagne, les élections législatives de Septembre seront déterminantes
De l’autre côté du Rhin, le niveau de soumission à Washington définit les différents camps.
D’abord du côté des pro-américains : Les Verts Allemands, Die Grünen, ont choisi comme représentant Annalena Baerbock, championne de trampoline et souriante en toutes circonstances, elle a le physique et le charisme nécessaires pour incarner ces idées superficielles au possible. Biberonnée aux doctrines politiques anglo-américaines, elle est passée par la London School of Academics où elle a étudié le droit international avant de devenir membre du German Marshall Fund, du Young Leaders Program, du Forum économique mondial et du Conseil Europe/Transatlantique de la Fondation Heinrich Böll du parti vert. Parfaitement formatée, elle a pu se hisser à la tête du parti vert sans même avoir besoin d’expérience politique ou administrative.
Selon un sondage Kantar, le parti écologiste est placé en tête des intentions de vote avec 28 % contre 27 % pour le CDU de Merkel. Plus surprenant encore, selon l’hebdomadaire Wirtschafts Woche, sur un panel de 1500 chefs d’entreprise, Baerbock est encore devant avec 26,5 % des voix.
Ensuite, le parti libéral-démocrate (FDP) et son candidat Christian Lindner sont farouchement anti-russes et deuxième des intentions de vote sur un panel de 1500 chefs d’entreprise selon le sondage Wirtschafts Woche.
Dans une position plus ambiguë, se trouve l’Union Chrétienne Démocrate (CDU) porté par Armin Laschet, qui propose un modèle plus raisonnable et pragmatique, mais les observateurs imputent sa faible représentation dans les sondages à son manque de charisme.
Finalement, du côté des « pro-russes », Die Link a obtenu 7 % des intentions de vote selon Kantar. Sahra Wagenknecht et son mari Oskar Lafontaine, principaux cadres du parti portent un regard critique sur l’OTAN et l’impérialisme états-unien mais évitent des prises de position trop risquées pour toujours pouvoir être inclus dans une coalition de gauche.
« Alternative pour l’Allemagne » (AfD), quant à lui souhaite normaliser les relations avec la Russie mais sa réputation de parti d’extrême droite le prive de potentielle coalition et donc de plus de représentation politique.
Dans le reste des pays occidentaux, les critiques de l’OTAN sont également aux extrémités des échiquiers politiques. Ils forment des groupes présentant en apparence trop de différences d’opinions pour pouvoir s’allier derrière une quelconque vision du monde. Cette tendance se reflète parfaitement en France où les américano-sceptiques de gauche sont La France Insoumise et le Parti Communiste Français, et ceux de droite le Rassemblement National (en fonction de l’humeur de Marine), ainsi que les différents partis pro-frexit.
Les écologistes allemands : des centristes mous s’imaginant sauveurs de l’Europe
Les Verts Allemands, à quelques mois des élections se présentent donc comme les sauveurs de l’Europe, rempart contre l’impérialisme Russe et alliés indéfectibles des Américains. Bien que leur programme électoral présente la Russie comme un danger pour les démocraties occidentales, les verts souhaitent développer leurs échanges avec les mouvements démocratiques russes, plus fidèles à leur vision des droits de l’homme. Drôle de vision de l’anti-impérialisme…
C’est donc naturellement que Les Verts s’opposent à la mise en place du Nordstream 2 qu’ils qualifient de « néfaste en terme de politique climatique et énergétique », préférant sûrement importer du gaz de schiste américains obtenu par fracturation hydraulique, dont l’impact sur l’environnement a été démontré comme étant néfaste.
Autre frein des verts à la coopération avec la Russie : le conflit supposément voulu par la Russie dans l’Est de l’Ukraine. Or, c’est bien le Gouvernement Ukrainien qui refuse d’appliquer les engagements pris dans le cadre des accords de Minsk. Mais nous ne sommes plus à une calomnie près…
Bien que désireuse d’imposer le respect des accords de paix à la Russie, Baerbock propose tout simplement de contourner le veto des grandes puissances à l’ONU pour selon ses mots : « arrêter un génocide » en Ukraine. Rien que ça! Le parti prône l’interventionnisme protecteur, pour protéger les populations, comme ce fut le cas (ou pas) en Syrie et en Lybie par exemple.
Une volonté autodestructrice, mais toujours dans le respect de l’environnement !
Avec entre autres désirs la numérisation des pièces d’identité, la fin de l’argent liquide et le développement des Intelligences Artificielles dans le but de mettre au point des « technologies de protection du climat », Les Verts entendent être le parti du monde d’après.
Dans le sillage des propositions fumeuses du parti, ces dernières ne sont pas sans rappeler le programme du Great Reset, évoqué lors du forum économique mondial de Davos, réclamant une économie plus tournée vers la numérisation, le changement climatique et l’intelligence artificielle. Selon cette doctrine, le capitalisme international aurait besoin d’innover pour subsister en stimulant l’investissement productif. Baerbock en tant que jeune leader du Forum économique mondial en a bien déduit que le changement climatique était le parfait moteur à cette transition.
Parti écologiste allemand : la source du changement de paradigme
Alors partisans d’une fin de la Guerre Froide il y a 40 ans de cela, Les Verts en font consciemment la promotion de nos jours. Contrairement à ce que l’on pourrait penser, la trahison des Verts à la cause européenne ne date pas de la montée en puissance d’Annalena Baerbock au sein du parti. On peut dater ce virage transatlantique à 1998, année où Joschka Fischer, chef de file de l’aile « réaliste » des Verts allemands fut nommé ministre des affaires étrangères, faisant la joie des hauts responsables américains. Ancien bagarreur et militant d’extrême gauche, ce ministre n’a pas hésité à s’adonner à sa mission de pacificateur dans la campagne militaire menée par l’OTAN contre la Yougoslavie en 1999.
Cette décision a permis à Fischer d’écrémer son parti en en faisant quitter de leur propre chef les dissidents hostiles à l’OTAN, tout en le renforçant d’opportunistes et de pions facilement manipulables.
Après s’être enrichi en 2007 en créant son cabinet de consultants pour conseiller les entreprises sur la manière de s’adapter aux circonstances politiques de divers pays, l’ex-ministre s’est éloigné du monde politique… jusqu’à l’annonce de la candidature de Baerbock. En effet, Fischer, sentant la verve anti-Russe conquérir le champ politique, y a vu un nouveau combat à mener. Il a déclaré vouloir « frapper la Russie là où ça fait vraiment mal » et évoquait la possibilité d’intégrer le FDP qui se coaliserait avec Les Verts.
Quid des écologistes en France ?
Au moins aussi opportunistes, démagogues et soumis que leurs voisins allemands, les écologistes Français ont largement profité de l’affaissement de la confiance octroyée aux partis traditionnels et du faible taux de participation aux élections dû à la pandémie pour remporter plusieurs grandes mairies. Entre l’interdiction des arbres de Noël, l’invention des bateaux à voile polluant, et la subvention de la construction de mosquées à Strasbourg, les Verts semblent déterminés à se ridiculiser au moins autant que les autres partis à l’échelle locale !
Mais malgré quelques bad buzz de ses maires partisans, Yannick Jadot, candidat EELV aux élections présidentielles 2022 voit en la popularité grandissante de Baerbock une occasion d’avoir une vision de la politique extérieure et de défense plus uniforme… en s’alignant le plus possible sur la position américaine !
Jadot voit en la Chine, la Russie ou la Turquie des régimes autoritaires ayant pour but de déstabiliser nos démocraties occidentales en « diffusant de fausses informations » et pire encore « en rachetant nos entreprises clés ». C’est un comble quand on sait que c’est l’Union Européenne, projet vivement encouragé et porté par les États-Unis qui permet aux puissances étrangères d’acheter les entreprises essentielles à notre indépendance. D’ailleurs, les saints États-Unis eux non-plus ne se gênent pas pour intervenir dans l’économie tricolore et y faire leur marché ! Cela ne gênait visiblement pas Yannick Jadot quand Alstom s’est vu racheter par General Electric !
Quel est le rôle de l’Europe dans ce nouveau souffle de Guerre Froide, exacerbé par l’administration Biden ? Celle de vassal des Etats-Unis, pris entre deux feux comme le désirerait le Président Américain ? Ou une alternative sauvera-t-elle le vieux continent de ce dualisme mortifère ?
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